Qu’est-ce qu’elle a ma gueule ?
C’est donc le jour de l’opération, Mémé la dégueu est partie au petit matin et je tente de me reposer un peu. Une demi-heure avant de passer au bloc, l’infirmière vient me mettre un antibiotique en intraveineuse. Elle me demande si j’ai des allergies, je réponds « pas médicamenteuses ». Bon, en fait toute ma vie on m’a dit que j’étais allergique à la pénicilline parce que quand j’étais bébé, on m’en avait donné et j’avais fait une crise d’urticaire. Face à cette conclusion un peu hâtive, mon allergologue m’avait suggéré l’année dernière de vérifier cette allergie à l’hôpital car, disait-elle, beaucoup de personnes pensent être intolérantes à la pénicilline et ce n’est pas vrai. OK. J’ai donc passé une journée à l’hosto à prendre des médicaments à la pénicilline sous contrôle médical. N’ayant fait aucune réaction, la mention « allergique à la pénicilline » avait ainsi été rayée de mon carnet de santé.
C’est donc sans aucune hésitation que je laisse l’infirmière m’injecter de la pénicilline dans le sang. Bon, là, je sens que vous voyez venir la chose : 15 minutes après, je commence à voir le monde un peu bizarrement, difficilement même. Mon champ de vision est rétréci. Péniblement, je m’extirpe du lit et me traîne à la salle de bain pour me regarder dans la glace. Horreur ! Mes yeux sont tout gonflés, mes paupières ressemblent à des choux fleurs, je suis en train de faire un œdème. J’appelle l’infirmière qui me débranche la perf’. Au même moment, le brancardier arrive pour me descendre au bloc. Là, fatiguée tant par la douleur que par le manque de sommeil, effrayée par mon visage défiguré, je me mets à pleurer. Le brancardier ne sait plus quoi faire sur le trajet jusqu’à la salle d’opération. Il me dit « Mais, arrêtez de pleurer comme ça, Mademoiselle, après, on va croire que je vous ai fait du mal ! » et moi de lui répondre « Mais, j’y peux rien ! J’ai la tête d’Elephant Man, c’est dur quand même ! ».
Il m’installe sur la table d’opération. Là, trois têtes pourvues masques et chapeaux verts se penchent au dessus de moi et me demandent « Qu’est-ce que vous avez aux yeux ? ». Moi : « Une allergie à la pénicilline. » Eux : « Ah ! Vous ne saviez pas que vous étiez allergique ? » Moi : « Non, je savais seulement que je n’étais PAS allergique. Bon, c’est compliqué, laissez tomber. »
Là-dessus, on me fait souffler dans le ballon, je m’endors, on m’opère.
…
La salle de réveil, c’est toujours un truc un peu étrange. On ouvre un peu les yeux, on les referme, on les rouvre, etc. On est super dans le coton. Je regarde un peu ce qui se passe dans la salle. Des infirmières habillées en vert s’affairent. Je voudrais bien toucher mes yeux pour voir s’ils ont dégonflés…eh oui, c’était ma dernière pensée avant de m’endormir, il est normal que ça soit ma première obsession au réveil. Ca a l’air toujours enflé. L’infirmière me donne des compresses humides, ça fait du bien.
Le brancardier vient me chercher, m’amène dans une nouvelle chambre, en chirurgie. Il y a un lit vide à côté, on me dit qu’une patiente va arriver plus tard.
Je dors.
…
Quelques heures après, le brancardier revient avec une vieille dame qu’il installe sur le lit. Il me dit qu’elle a 101 ans ! Je vais bientôt faire connaissance avec Hortense et, je ne le sais pas encore, mais cette rencontre va me bouleverser…et surtout faire remonter les vieilles dames dans mon estime.
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