Les prototypes de l'étudiant
Je me suis dit que j'allais profiter de cette dernière
journée de cours du semestre (et même de l'année en ce qui me concerne) pour
vous parler des prototypes de l'étudiant que j'ai eu le loisir d'observer ces
dernières années. Bien sûr, ces prototypes concernent les étudiants
universitaires français mais certaines remarques sont transférables à d'autres
cultures ou d'autres lieux d'enseignement (collège, lycée, formation continue
etc.) (Ouh là! voilà que je parle comme dans ma
thèse...conditionnement quand tu nous tient!)
Celui qui s'en fout
Celui-là est le plus facile à repérer, il arrive systématiquement 15 minutes en
retard (quand il vient), ne s'excuse pas et passe le cours à faire la gueule et
à soupirer quand on l'interroge.
Celui qui raconte sa vie
Il y en a toujours un (et c'est souvent une) par classe. On le/la repère dès le
premier cours car il/elle (bon je vais dire "elle" car je n'ai que
des exemples de femmes en tête), donc, elle trouve le moyen de vous raconter sa
vie dès la fin de la première séance. J'ai souvent eu le cas de femmes un peu
plus (voire beaucoup plus) âgées que la moyenne des étudiants et qui, un peu
mal à l'aise, viennent se justifier dans la reprise tardive de leurs études
(j'ai travaillé 10 ans à tel endroit, j'ai eu 3 enfants etc.) et prévenir
certaines absences futures (j'ai 3 enfants que j'élève seule ou j'ai 3 enfants
mais mon mari travaille beaucoup et je les élève seule ou j'ai 3 enfants dont
un souvent malade ou j'ai 3 enfants tout court, parfois une combinaison de plusieurs
de ces propositions). Attention, loin de moi l'idée de critiquer ces mères de
famille qui reprennent leurs études, au contraire, je trouve cela très
courageux et plusieurs réussissent. Seulement, celles qui viennent raconter
leur vie sont, en général, celles qui cherchent des excuses et qui vont galérer
dans le cours. Elles manquent aussi souvent de tact. Ainsi, cette année en
septembre, 5 minutes avant l'examen, l'une d'entre elles est venue me montrer
toutes ses photos de vacances (!), je lui ai dit "Euh, c'est peut être pas
tellement le moment, là, non?"
Celui qui stresse
Celui ou celle qui stresse est celui qui va vous poser 15 fois la même question
sur l'examen ou le devoir à rendre. C'est également celui qui, pendant
l'examen, vous appelle plusieurs fois pour une question sur le sujet pour être
bien sûr qu'il a bien compris!
Celui qui fayotte
Etrangement, je n'ai pas vraiment connu les cas de vrai fayots dans le but
d'avoir de bonnes notes mais plutôt des étudiants qui étaient vraiment intéressés
par le cours. En général, ils viennent à la fin du cours (quand celle qui
raconte sa vie est partie) pour vous poser des questions dans tous les sens sur
des trucs qui ne sont pas toujours de votre spécialité. Cette année, j'ai eu un
cas remarquable (excellent étudiant par ailleurs) d'un étudiant qui avait lu
toute la bibliographie que j'avais donnée à titre indicatif. Bon, normalement,
je donne une biblio en début d'année, rares sont les étudiants qui consultent
au moins un de ces bouquins. D'ailleurs, je dois avouer bien modestement que je
ne les ai même pas tous lus en entier, les ouvrages que je recommande. Donc,
cet étudiant, chaque semaine, venait me voir à la fin du cours, genre:
Etudiant: Mme XXXX, je viens de lire le livre de XXXX que vous aviez recommandé
et j'ai une question à vous poser.
Moi: (en aparté) Aïe!
Etudiant: Oui, à la page 156, l'auteur parle de bla bla bla, qu'est-ce
qu'il veut dire?
Moi (en aparté) Ah! Ce livre était trop chiant, j'ai pas dépassé
la page 23.
Etudiant: Parce que j'ai trouvé ce livre vraiment fascinant mais je
voulais savoir si vous étiez d'accord avec l'auteur?
Moi: Oui, ben, euh...Pffff, je l'ai lu il y a longtemps celui-là...je ne
m'en souviens plus très bien, vous savez, j'en lis tellement...vous pouvez pas
me résumer un peu le contenu pour me le remettre en mémoire?
Celui qui n'existe pas
Il y en a toujours un qui est sur votre liste, qui a parfois fait une
apparition au premier cours mais qui est passé dans la 4e dimension entre temps
et n'en est jamais revenu. Vous connaissez son nom mais pas son visage, à
l'administration, on vous en parle mais sans savoir qui c'est, bref il devient
peu à peu une légende, tout le monde parle de lui mais personne ne l'a jamais
vu.
Celui qui se cache
Derrière les autres, il est discret et ne parle jamais.
Celui qui ramène tout à lui
Il y en a toujours un pour vous sortir un contre exemple se rapportant à son
cas personnel. Par exemple, il y a 4 ans, j'avais un étudiant handicapé: il
était quasiment aveugle. Il était carrément insupportable et ramenait toujours
tout à lui. Un jour, j'explique aux étudiants, futurs enseignants de langue,
que c'est important de faire des gestes pour aider les apprenants de langue
étrangère à mieux comprendre. Cet étudiant intervient et dit "Oui mais si
tous nos élèves sont tous aveugles, hein? Ca sert à rien de faire des
gestes?"
No Comment.
Celui qui fait tout simplement chier
Plus discret en licence, sa personnalité se développe arrivé en maîtrise. Son
but: vous déstabiliser, vous mettre mal à l'aise, en gros vous faire chier. Pas
nécessairement parce qu'il ne vous aime pas mais parce que ça lui plait et que
c'est sa nature profonde. L'année dernière, je faisais un cours nouveau dans
lequel je n'étais pas très à l'aise (je ne pense pas que ça se voyait, mais je
le sentais). Il y a avait une étudiante qui m'interrompait toutes les 5 minutes
pour me poser une question sur ce que, en général, je m'apprêtais à dire. Mais
j'avoue que, plusieurs fois, elle m'a coincée sur des trucs que je ne savais
pas et ça m'énervait. Mais ce qui est finalement curieux, c'est qu'après le
dernier cours elle est venue me dire "J'ai trouvé votre cours super bien
et très structuré". ????
Voilà, bon, il y a aussi le macho, la bimbo, le/la déconnecté(e)...mais je n'en
finirais plus! Demain, je vous fais les prototypes de l'étudiant pendant un
examen. C'est pas triste non plus et j'ai eu de bons exemples ce matin!